Puisque le chat peut voir, entendre et sentir avec plus d’acuité que nous, il est consolant de se dire que, dans un domaine au moins, nos sens sont plus raffinés que le sien. Pour ce qui est du goût, notre palais est légèrement plus délicat. Mais à peine. Comme nous, les chats sont sensibles à quatre goûts fondamentaux : acide, amer, salé, sucré. Nous réagissons fortement aux quatre, mais les chats ne sont pas très portés sur le sucré.
Récemment encore, de nombreux experts affirmaient d’un ton péremptoire que les chats, presque seuls parmi les mammifères, étaient incapables de détecter le sucré.
L’un avait le front d’affirmer : « Le chat ne réagit pas au goût sucré.» Un autre renchérissait sans vergogne : « Le goût du sucre n’est pas discerné par le chat. » Cette idée reçue est battue en brèche aujourd’hui. De nouvelles expériences ont prouvé de façon concluante que les chats peuvent apprécier la présence du sucre. Si on offre à un chat affamé le choix entre du lait dilué à un quart de sa teneur normale et additionné de saccharose ou le même lait sans aucun additif, il préférera infailliblement le liquide
sucré.
Si tel est le cas, pourquoi n’en a-t-on pas tenu compte dans le passé?
Pour une raison simple. Dans la plupart des tests, le facteur sucré n’entre pas en ligne de compte pour le chat. Il est d’une importance tellement secondaire pour lui qu’il « passe outre ». Si, par exemple, l’expérience se fait avec du lait entier ou coupé de moitié, il ne manifeste aucune préférence marquée pour la teneur en sucre. Dans ce cas, c’est son attirance pour le lait qui prime. En revanche, lorsque le lait est fortement dilué, le facteur sucre intervient. Si les chats apprécient cette saveur, ce n’est toutefois pas un penchant très marqué.
C’est au goût acide qu’ils réagissent le plus vivement ; enfin vient l’amer, puis le salé et, en dernier, le sucré. Quand la nourriture touche la langue, elle entre en contact avec les papilles sensorielles. Les papilles situées au milieu de la langue sont larges, rugueuses et orientées vers l’arrière. Dans cette région, la surface de la langue n’a pas le goût pour fonction. Les bourgeons gustatifs ne sont pas situés dans cette partie centrale. C’est une zone destinée essentiellement à détacher la viande des os et à nettoyer la fourrure. Les récepteurs gustatifs sont localisés à l’extrémité et à l’arrière de la langue. Les goûts acides peuvent être détectés dans ces différentes régions, mais l’amer se limite à l’arrière et le salé à l’avant.
Pourtant, les réactions les plus puissantes ont trait à l’odeur, ou aux effluves, émanant de la nourriture. C’est là l’information prédominante, lorsque le chat s’approche de son écuelle. C’est pourquoi il commence souvent par renifler, et s’en va parfois sans même y avoir goûté. Tel le vrai connaisseur auquel il suffit de humer un vin pour en apprécier le bouquet, le chat peut savoir tout ce qui l’intéresse sur le menu au seul fumet qui s’en échappe.
Si l’animal en prend une bouchée, la langue réagit également à la température de l’aliment. Les ancêtres sauvages de notre chat domestique aimaient dévorer des proies fraîchement tuées — ce n’étaient pas des nécrophages, mais des prédateurs. Les descendants apprivoisés de ce lointain aïeul ont conservé un point de vue identique sur la question. La température idéale pour la nourriture d’un félin est 30°C — exactement la température de la langue du chat. Pour ce chasseur, manger un produit issu tout droit du réfrigérateur est une hérésie — à moins qu’il ne soit terriblement affamé et prêt à manger n’importe quoi ou presque. Malheureusement, pour la plupart des chats contemporains, manger chaud est un véritable luxe.
Comme beaucoup d’humains, ils ont appris le « fast food », ce fléau des temps modernes.
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